Qualité d'Air Intérieur : Au-delà des Étiquettes A+ et A des Matériaux de Construction

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Un produit noté A+ peut-il réellement assurer une meilleure qualité d’air qu’un autre classé A ? Quels sont les véritables impacts des Composés Organiques Volatils (COV) sur notre santé ? Cet article décrypte les limites de l’étiquetage sanitaire et vous donne les clés pour un environnement intérieur plus sain.
L'équipe du Laboratoire Luxembourgeois de Contrôle Sanitaire
Publié le 19 mars 2025 00:00 | Temps de lecture: 5 min

La qualité de l’air intérieur est un enjeu majeur de santé publique, d’autant plus que nous passons entre 80 et 90 % de notre temps dans des espaces clos : habitations, bureaux, écoles, transports… Pour limiter les risques liés aux émissions de composés organiques volatils (COV), l’étiquetage sanitaire des matériaux de construction et de décoration a été rendu obligatoire en 2012. Ainsi, face au rayon peinture de votre magasin de bricolage, vous avez sans doute remarqué les étiquettes A+, A, B ou C. Mais que signifient réellement ces classifications pour votre santé et votre bien-être ? Un matériau A+ garantit-il vraiment un air plus sain ? 

Comprendre l'étiquetage des émissions de COV : ce que vous devez savoir

Qu'est-ce que l'étiquetage sanitaire ?

L'étiquetage sanitaire des produits de construction et de décoration est une classification obligatoire qui indique leur niveau d'émission en Composés Organiques Volatils (COV). Depuis le 1er septembre 2013, cette réglementation s'applique aux revêtements muraux, sols, peintures, vernis, cloisons, faux plafonds, produits d'isolation, portes, fenêtres et produits de pose.

L'échelle d'étiquetage va de A+ (très faibles émissions) à C (fortes émissions), sur la base de tests réalisés en laboratoire après 28 jours d'exposition. Actuellement, 11 COV sont pris en compte, dont le formaldéhyde, classé cancérogène.

Les limites de l’étiquetage actuel

Attention, cette classification repose sur des mesures effectuées dans une pièce standard (4m x 3m x 2,5m) avec un taux de ventilation spécifique, ce qui ne reflète pas nécessairement les conditions réelles de votre logement. De plus, l’accumulation de matériaux classés A+ ne garantit pas automatiquement un air intérieur de qualité A+..

Seuils de concentration par catégorie

Le tableau ci-dessous présente les seuils limites des concentrations d'exposition (en µg/m³) pour chaque classe d'étiquetage :

COMPOSÉS ORGANIQUES VOLATILSÉtiquettes
CBAA+
Formaldéhyde> 120< 120< 60< 10
Acétaldéhyde> 400< 400< 300< 200
Toluène> 600< 600< 450< 300
Tétrachloroéthylène> 500< 500< 350< 250
Xylène> 400< 400< 300< 200
1,2,4-Triméthylbenzène> 2000

< 2000< 1500< 1000
1,4-Dichlorobenzène> 120< 120< 90< 60
Ethylbenzène> 1500< 1500< 1000< 750
2-Butoxyéthanol> 2000< 2000< 1500< 1000
Styrène> 500< 500< 350< 250
COVT (composés organiques volatils totaux)> 2000< 2000< 1500< 1000

Les COV et le formaldéhyde : quels impacts sur votre santé ?

Que sont les Composés Organiques Volatils (COV) ?

Les COV sont des substances chimiques qui s'évaporent facilement à température ambiante. Utilisés dans la fabrication de nombreux produits d'aménagement et de décoration, leurs effets sur la santé peuvent être préoccupants. Ils peuvent provoquer des irritations cutanées, des irritations des muqueuses et du système pulmonaire, et certains composés présentent même des effets cancérigènes. Ces substances invisibles constituent donc un enjeu majeur dans la qualité de l'air que nous respirons quotidiennement.

Les sources courantes dans nos intérieurs

Les sources de COV dans les bâtiments sont multiples, comme l'illustre ce tableau issu de l'étude :

COMPOSÉSSOURCES DANS LE BÂTIMENT
Formaldéhyde- Réactivité chimique entre l'ozone et certains COV
- Produits de construction et de décoration (liants ou colles urée-formol)
- Sources de combustion (tabac, bougies, encens, cheminées, cuisinières à gaz)
- Produits d'entretien et cosmétiques
AcétaldéhydeFumée de tabac, photocopieurs, imprimantes laser, panneaux de bois
ToluènePeintures, vernis, colles, encres, moquettes, vapeurs d'essence
TétrachloroéthylèneNettoyage à sec, moquettes, tapis
XylènePeintures, vernis, colles, insecticides
1,2,4-TriméthylbenzèneSolvants pétroliers, carburants, goudrons, vernis
1,4-DichlorobenzèneAntimites, désodorisants, blocs W-C
EthylbenzèneCarburants, cires
2-ButoxyéthanolPeintures, vernis, fongicides, traitement du bois
StyrèneMatières plastiques, isolants, carburants, tabac, encens

Focus sur le formaldéhyde : un polluant à surveiller de près

Le formaldéhyde, classé "substance cancérogène avérée pour l'Homme" depuis 2004, est omniprésent dans nos intérieurs. On le retrouve principalement dans la fabrication de colles, résines et vernis. Il est présent dans le contreplaqué, les panneaux agglomérés et de nombreux meubles. Même à faibles doses, ce composé peut provoquer des irritations oculaires et respiratoires, ce qui en fait un polluant particulièrement important à surveiller dans nos espaces de vie.

Étude de cas : quand A+ ne signifie pas toujours air plus sain

Pour comprendre concrètement l'impact des étiquettes sur la qualité d'air, une étude a été menée dans un appartement témoin de 20 m², équipé d’un système de ventilation standard.. Les chercheurs ont simulé trois situations différentes avec des matériaux variés, tout en maintenant les mêmes conditions de ventilation sur une période de 28 jours.

1.Un aménagement uniquement avec des matériaux étiquetés A+ (peinture, parquet stratifié, colle et mobilier en panneaux agglomérés).

2.Une combinaison de matériaux A+ et de matériaux spécifiquement conçus pour limiter les émissions de COV, comme une peinture sans formaldéhyde et un parquet massif non traité.

3.Un mélange de matériaux A+ et A, incluant une peinture A et un sol en PVC classé A+.

 

Des résultats surprenants

L’objectif était d’analyser les émissions de Composés Organiques Volatils Totaux (COVT) et de formaldéhyde à différentes périodes (3 jours et 28 jours après l’installation des matériaux).

ScénarioCOV Totaux (µg/m³) - 3 joursCOV Totaux (µg/m³) - 28 joursFormaldéhyde (µg/m³) - 3 joursFormaldéhyde (µg/m³) - 28 jours
1 - 100 % A+3200800188
2 - A+ optimisé150040094
3 - A+ et A mixés18006002212

Le premier scénario, censé être le plus "sain" (100 % A+), a enregistré des niveaux de COVT bien supérieurs aux attentes, dépassant les 3000 µg/m³ à court terme ! À l’inverse, le deuxième scénario a montré des concentrations nettement plus faibles, prouvant que la qualité spécifique des matériaux est plus déterminante que l’étiquette A+ elle-même.

Le troisième scénario a révélé un léger dépassement du seuil recommandé de formaldéhyde au début, bien que les valeurs restent acceptables après 28 jours.

Au-delà des étiquettes : comment garantir un air intérieur sain ?

Cette étude démontre clairement les limites de l'étiquetage réglementaire. Des matériaux tous étiquetés A+ peuvent présenter des différences significatives d'émissions entre eux. Un mélange judicieux de matériaux A et A+ peut parfois offrir une meilleure qualité d'air global qu'une solution exclusivement A+. Il faut également tenir compte du fait que la ventilation joue un rôle crucial dans la concentration des polluants intérieurs, ce qui complexifie encore l'équation.

Impact crucial de la ventilation

La seconde phase de l'étude a évalué l'influence du taux de renouvellement d'air sur les concentrations de COV. Trois maquettes identiques ont été testées avec différents débits de ventilation : 0,1 volume/heure (faible), 0,5 volume/heure (réglementaire) et 1 volume/heure (élevé).

Composé0,1 vol/h (µg/m³)0,5 vol/h (µg/m³)1 vol/h (µg/m³)
Formaldéhyde (3 jours)18117,3
Formaldéhyde (28 jours)9,24,93,2
Acétaldéhyde (3 jours)236,63,6
Acétaldéhyde (28 jours)144,4<3
COV Totaux (3 jours)2005321
COV Totaux (28 jours)7012<2

✔️ Une ventilation insuffisante (0,1 vol/h) entraîne des concentrations élevées, dépassant les seuils A+ en début de période.
✔️ Une ventilation standard (0,5 vol/h) permet de réduire significativement les COV après 28 jours.
✔️ Un débit de ventilation plus élevé (1 vol/h) améliore encore davantage la qualité de l’air, avec des valeurs quasi nulles après un mois.

 

Conclusion : Une approche globale est indispensable

Cette étude démontre que l’étiquette A+ ne suffit pas à garantir un air intérieur sain. Le choix des matériaux doit prendre en compte leur qualité intrinsèque et leur composition spécifique. Par ailleurs, la ventilation joue un rôle déterminant dans la dissipation des polluants.

 

FAQ : Vos questions sur les COV et l'étiquetage sanitaire

  • Qu'est-ce qu'un COV exactement ?

    Les Composés Organiques Volatils (COV) sont des substances chimiques qui s'évaporent facilement à température ambiante. Ils comprennent une grande variété de molécules comme le formaldéhyde, l'acétaldéhyde, le toluène et le benzène. Ces composés sont présents dans de nombreux produits de construction, de décoration et d'entretien.

  • Qu'est-ce que l'étiquetage A+, A, B, C sur les matériaux de construction ?

    C'est un système obligatoire depuis 2013 qui classe les matériaux selon leurs émissions de Composés Organiques Volatils (COV). A+ indique de très faibles émissions, tandis que C signale des émissions élevées. Cette classification aide les consommateurs à identifier les produits potentiellement moins nocifs pour la santé.

  • Est-ce que choisir uniquement des produits A+ garantit un air intérieur sain ?

    Non, comme l'a démontré l'étude présentée dans cet article, des matériaux tous étiquetés A+ peuvent parfois générer des niveaux élevés de COV dans l'air. La qualité spécifique de chaque produit et l'interaction entre différents matériaux jouent un rôle crucial que l'étiquetage seul ne permet pas d'évaluer.

  • Quels sont les dangers des COV pour la santé ?

    Les COV peuvent causer diverses irritations (yeux, gorge, peau), des maux de tête, des problèmes respiratoires, et certains, comme le formaldéhyde, sont classés cancérogènes. Une exposition prolongée peut aggraver l'asthme et contribuer au développement de maladies chroniques.

  • Comment savoir si l'air de mon logement contient trop de COV ?

    Des symptômes comme des irritations oculaires, des maux de tête récurrents ou des difficultés respiratoires peuvent indiquer un problème. Pour être certain, vous pouvez faire réaliser des mesures de la qualité de l'air intérieur par des professionnels spécialisés ou utiliser des capteurs spécifiques.

  • La ventilation peut-elle compenser des matériaux émettant beaucoup de COV ?

    Une bonne ventilation aide à réduire la concentration de polluants, mais elle ne peut pas complètement compenser l'utilisation de matériaux très émissifs. Il est préférable de combiner des matériaux à faibles émissions avec une ventilation adéquate pour obtenir les meilleurs résultats.

  • Les produits A+ sont-ils toujours plus chers que les produits A ou B ?

    Pas nécessairement. Bien que certains produits A+ puissent être plus coûteux en raison de leur formulation spéciale, il existe aujourd'hui de nombreuses options abordables dans cette catégorie. Il est souvent possible de trouver un bon équilibre entre qualité et prix.

  • Combien de temps les matériaux continuent-ils à émettre des COV après installation ?

    La période d'émission varie selon les matériaux. Certains libèrent la majorité de leurs COV dans les premières semaines, tandis que d'autres peuvent continuer à émettre pendant plusieurs mois, voire années. Les peintures émettent généralement pendant 2-3 semaines, alors que certains panneaux de bois peuvent émettre pendant des années.

  • Comment puis-je améliorer la qualité de l'air dans un logement existant ?

    Vous pouvez augmenter la ventilation (ouvrir les fenêtres régulièrement, vérifier le bon fonctionnement de la VMC), utiliser des plantes dépolluantes, éviter les produits ménagers chimiques, et lors de rénovations, choisir des matériaux à faibles émissions en vous basant sur des informations plus complètes que le simple étiquetage..

  • Les meubles et textiles ont-ils aussi un impact sur la qualité de l'air intérieur ?

    Oui, absolument. Les meubles, particulièrement ceux en bois aggloméré, les textiles traités avec des retardateurs de flamme, les tapis et moquettes peuvent être d'importantes sources de COV et d'autres polluants comme les phtalates. Il est conseillé de les choisir avec attention et de les aérer avant installation.

  • L'odeur d'un produit indique-t-elle la présence de COV ?

    Pas nécessairement. Certains COV sont odorants, mais d'autres sont inodores, comme le formaldéhyde à faible concentration. À l'inverse, une odeur forte n'indique pas toujours des niveaux élevés de COV dangereux. Seules des mesures précises peuvent déterminer les concentrations réelles.

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